De plus en plus de personnes négocient avec leur entreprise un déménagement loin de leur bureau. Cinq salariés reviennent sur ce changement, qu’ils ne regrettent pas aujourd’hui.
Quand Alice a annoncé il a près d’un an qu’elle quittait la capitale pour s’installer à Grenoble, ses proches lui ont fait part de leur étonnement : « Tu vas quitter ton poste? Pourtant le job te plaît ! » , se remémore la directrice du service client de l’entreprise Yousign, qui édite une solution de signature électronique. Mais elle n’a pas eu besoin de faire ce choix : « J’ai quitté Paris, mais je suis restée dans mon entreprise » , raconte-t-elle à Maddyness.
Cette manager a vécu sept ans dans la capitale, mais elle a toujours su qu’elle retrouverait un jour la montagne et la nature qui lui manquaient. « La crise sanitaire a été un élément déclencheur, se souvient-elle. La vie parisienne, que j’aimais pour organiser des sorties et sa richesse culturelle, perdait tous ses avantages et mettait en lumière ses inconvénients : un quotidien dans des petites surfaces, sans extérieur ni possibilité de prendre l’air… ». C’est là qu’elle a franchi le cap et frappé à la porte du bureau des cofondateurs de Yousign, qui ont tout de suite accepté qu’elle déménage, en décembre 2020.
Partir pour une ville plus calme
Chez Algolia, Eric, DRH, avait aussi des envies d’ailleurs. « Mon mari et moi en avions marre de la grisaille parisienne, et on voulait aller dans une ville à taille humaine, plus calme et paisible », précise celui qui a décidé de poser ses valises à Aix-en-Provence. À 30 kilomètres de là, Cherif s’est installé à Marseille après avoir quitté les bureaux d’Approach People Recruitment à Dublin. « Ma femme est tombée enceinte pendant le Covid et, si notre vie d’expatriés à Dublin nous plaisaient, on voulait se rapprocher de nos proches pour voir notre fille naître et grandir», explique le consultant.
Et pour bien choisir sa destination d’accueil, certains se font accompagner. C’est le cas de Jacques, un entrepreneur qui s’apprête à quitter Toulouse pour sa campagne environnante. « J’ai utilisé la plateforme VivrOvert, un outil très pratique pour prendre en compte tous les critères et obstacles à un tel changement… Ça m’a permis d’affiner mon choix en déterminant les endroits qui avaient la fibre ou les transports en commun, qui sont des éléments essentiels pour moi » . Taux d’ensoleillement, services de proximité, distance d’une gare, d’une autoroute, de la mer ou d’une école, pluviométrie et altitude… Une fois les différentes catégories remplies sur le site, une carte de France, colorée du vert au orange, désigne les zones propices à l’installation, adaptée à chaque utilisateur.
Mais cette transition ne se fait pas sans une série de négocations et de préparatifs avec son entreprise. Chez Algolia, le service RH a du faire un travail de pédagogie auprès de la direction, aux Etats-Unis, pour leur expliquer ce qu’il était possible ou pas de faire en France. « Là-bas, le salaire peut être modifié en fonction du lieu de vie et un salarié de San Francisco, de New-York ou d’Arizona ne sera pas payé de la même façon… J’ai fait un gros boulot d’éducation pour expliquer que cela n’était pas applicable ici ». Dans cette startup, on a bien compris que, pour rester compétitif et conserver ses talents dans un marché tendu, il faut pouvoir s’adapter aux envie des salariés comme nous l’expliquait il y a quelques semaines le co-fondateur, Julien Lemoine. « C’est pour ça qu’on développe un format hybride, où les salariés ont le choix entre un télétravail intégral, partiel ou une présence au bureau » , appuie Eric.
Des opportunités à la clé
Chez Yousign, Alice n’a pas eu à batailler avec la direction puisque « la culture du remote était déjà présente bien avant la crise » . Une série de mesures ont rassuré la salariée pour effectuer sa transition sereinement : « L’entreprise participe aux frais d’équipements pour ne pas travailler sur son canapé avec son ordinateur sur les genoux, propose des places dans des lieux de coworking et dispose d’outils pour faciliter le télétravail… Sans ça, je ne serais pas partie m’isoler ailleurs ». Le plus difficile pour elle a été l’organisation personnelle de sa nouvelle vie. « J’ai toujours pensé que je n’étais pas faite pour le télétravail, donc je me suis formée à ça : j’ai défini un cadre, un rythme, détaille-t-elle. Je me réveille à la même heure, je m’habille et j’ai la chance d’avoir un bureau isolé, dans lequel je me force à ne pas revenir le soir une fois que j’ai fermé la porte, pour bien séparer vie professionnelle et personnelle ».